Le droit de garde et d’accès pour les grands-parents : trois erreurs à éviter

Le rôle des grands-parents dans la vie des petits-enfants

Les grands-parents peuvent jouer un rôle essentiel dans la vie d’un enfant et soutenir les parents dans l’éducation de ce dernier. Beaucoup de grands-parents offrent de s’occuper de leurs petits-enfants sans rémunération et prennent le temps de faire des activités avec ceux-ci. De plus, les grands-parents peuvent représenter un point de référence culturel pour que les petits-enfants comprennent mieux l’histoire de leur famille. Par ailleurs, certains grands-parents contribuent aux dépenses financières des parents pour offrir de meilleurs opportunités éducatives, religieuses ou sociales aux enfants, ce qui finit par aider l’enfant à s’épanouir.

Les éléments pris en compte pour obtenir la garde ou l’accès aux petits-enfants

Au cours de l’histoire du droit de l’enfance, deux tendances se sont développées : d’un côté, les décisions en faveur de l’autonomie parentale, de l’autre côté, les décisions favorisant l’intégration des grands-parents dans la vie des enfants. En Ontario, depuis 2016, la Loi portant réforme du droit de l’enfance autorise de manière explicite les grands-parents de réclamer la garde et l’accès de leurs petits-enfants.

Lorsque les grands-parents présentent une requête pour avoir des droits de garde ou d’accès à leurs petits-enfants, les tribunaux prennent en considération les facteurs suivants :

  • l’amour, l’affection et les liens affectifs qui existent entre l’enfant et les grands-parents
  • le point de vue et les préférences de l’enfant, dans la mesure où il est raisonnablement possible de les déterminer
  • la durée de la période pendant laquelle l’enfant a vécu dans un foyer stable
  • la capacité et la volonté des grands-parents de donner des conseils à l’enfant, de s’occuper de son éducation, de lui fournir les objets de première nécessité et de satisfaire ses besoins particuliers
  • le projet des grands-parents relatifs aux soins et à l’éducation de l’enfant
  • le caractère permanent et stable de la cellule familiale où l’on propose de placer l’enfant
  • l’aptitude des grands-parents à agir en tant que parent et
  • les éventuels liens familiaux entre l’enfant et les grands-parents

Malgré l’évolution du droit, les tribunaux continuent souvent à privilégier le droit d’accès des parents par rapport à ceux des grands-parents. Cela dit, en plus d’analyser la relation des grands-parents avec l’enfant, les tribunaux regarderont aussi si les parents ont décidé de nier l’accès aux grands-parents de manière arbitraire. Pour que leurs droits d’accès ne soient pas réduits ou supprimés, les grands-parents doivent éviter de commettre les trois erreurs suivantes.

1. Les grands-parents ne doivent pas remplacer le rôle des parents

En aucun cas les grands-parents doivent usurper le rôle du parent. Même si les parents souffrent de difficultés financières, psychologiques ou émotionnelles, le rôle des grands-parents n’est jamais de venir prendre la place des parents pour éduquer et élever les enfants. Bien sûr, les grands-parents sont toujours bienvenus pour assister dans le développement de leurs petits-enfants. Cependant, l’intervention des grands-parents dans la vie des petits-enfants doit être limitée et doit être approuvée par les parents.

Imposer un régime alimentaire ou une religion quelconque à l’enfant ou encore, inscrire un enfant à une activité ou un établissement scolaire spécifique sans consulter les parents sont des exemples de comportement qui seront réprimandés par les tribunaux judiciaires.

2. Les grands-parents ne doivent pas adopter une attitude hostile envers les parents

Bien que la législation ontarienne prévoie que les tribunaux doivent prendre en considération les droits des grands-parents lorsque ceux-ci présentent une demande d’accès aux petits-enfants, le droit d’accès aux petits-enfants n’est jamais automatique. Ainsi, il est important pour les grands-parents de garder une conduite qui est raisonnable envers les deux parents, notamment si les deux parents se séparent.

Parfois, des tensions peuvent se bâtir entre les grands-parents et le parent qui a la garde des petits-enfants, surtout si ce parent n’est pas leur enfant. Lorsque les grands-parents adoptent une attitude hostile envers le parent qui a la garde de l’enfant, ils réduisent leurs chances d’avoir gain de cause en cour. Souvent, les tribunaux préfèreront éviter de mettre de l’huile sur le feu en obligeant le parent en question d’autoriser l’accès de l’enfant aux grands-parents.

3. Les grands-parents ne doivent pas ignorer les petits-enfants

Pour maximiser le temps d’accès avec leurs petits-enfants, les grands-parents doivent s’assurer de bâtir une bonne relation avec l’enfant dès sa naissance. Dans les cas où l’enfant ne connaît presque pas ses grands-parents, un tribunal pourrait décider qu’il n’est pas forcément dans le meilleur intérêt de l’enfant de donner des droits d’accès aux grands-parents.

Il incombe aux grands-parents bâtir une relation positive avec l’enfant et ses parents. Visiter l’enfant de temps à autre est insuffisant pour créer ce type de relation. Les grands-parents doivent créer des liens affectifs réels et participer de manière très active dans la vie de leurs petits-enfants. De façon générale, les tribunaux sont prêts à accorder des droits d’accès aux grands-parents lorsque l’enfant a vécu chez eux ou lorsqu’il a passé une période considérable avec eux peu de temps avant les procédures judiciaires.

Avant de présenter une requête devant les tribunaux, il peut être judicieux de retenir les services d’un avocat pour connaître ses droits et ses obligations par rapport aux petits-enfants.

Karen Kernisant est avocate à Aubry Campbell MacLean et pratique dans le domaine du droit de la famille, du contentieux civil et du droit criminel.

Les conséquences de la violence conjugale sur les droits de garde, d’accès et de visite

Le divorce ou la séparation entraîne souvent une vague d’émotions chez chacun les époux : tristesse, solitude, jalousie, frustration et parfois, la colère. Ces sentiments haineux peuvent malheureusement pousser certains parents à commettre des actes violents. En 2016, le gouvernement fédéral estimait que parmi les homicides perpétués au Canada, près de 20% étaient reliés à des crimes de violence familiale. Il n’est donc pas étonnant qu’une personne faisant l’objet de violence conjugale sera souvent détenue à moins qu’un juge de paix estime qu’elle puisse être mise en liberté sous caution.

Impact des accusations criminelles sur le droit familial

Les poursuites criminelles sont, en principe, indépendantes des procédures de droit familial. Cela dit, lorsque des accusations criminelles sont portées contre un parent en processus de divorce ou de séparation, ces accusations peuvent indirectement affecter les droits de garde, de visite et d’accès du parent en question. En effet, les conditions de mise en liberté comprennent presque toujours une interdiction de communiquer avec la victime et de rester à certaine distance de celle-ci. Il s’avère que, dans un cas de violence familiale, la victime est souvent l’autre parent. L’accusé se voit donc privé du droit de retourner à sa résidence principale si l’autre parent et les enfants s’y trouvent toujours. Si les enfants de l’accusé sont très jeunes, il peut être compliqué pour lui de communiquer directement avec eux. Il peut donc être très difficile pour le parent accusé de faire des arrangements pour continuer à voir ses enfants.

Intervention de la Société de l’aide à l’enfance

Dans les cas de violence extrême, il est possible que les droits d’accès de l’accusé soient suspendus. Si l’accusé a porté atteinte à la vie ou la sécurité de l’enfant directement, le juge de paix peut même interdire l’accusé de communiquer avec l’enfant jusqu’à la fin des procédures criminelles. Dans ces cas, un organisme public tel que la Société de l’aide à l’enfance va souvent intervenir pour offrir des mécanismes de sécurité pour la victime et pour assurer la réintégration de l’accusé dans la vie de ses enfants en temps et lieu.

Suspension des droits de garde, d’accès et de visite

Si l’accusé est mis en liberté, il revient à la victime d’entamer les étapes nécessaires en devant la cour de droit de la famille pour apporter des modifications aux droits de garde, d’accès ou de visite de l’accusé. Pour ce faire, la victime doit prouver qu’elle serait exposée à un réel danger si l’accusé pouvait continuer à exercer ses droits d’accès. La victime peut avoir recours à :

  • Des photos montrant les blessures infligées par l’accusé;
  • Des messages exposant le comportement abusif de l’accusé; et
  • Des notes énonçant le changement de comportement des enfants depuis l’arrestation du parent accusé (nervosité, crainte, remord, etc.)

Le parent accusé doit alors réfuter ces éléments de preuve et convaincre le tribunal que ses droits d’accès devraient être maintenus. L’accusé peut soulever les arguments suivants :

  • Il a été mis en liberté par un tribunal pénal compétent;
  • Il n’y a aucune interdiction de communication à l’égard de ses enfants;
  • Les accusations portées contre lui ne sont pas reliées aux enfants;
  • Il n’a pas encore été reconnu coupable des accusations portées contre lui; et
  • La suspension de l’accès aurait un effet trop néfaste sur la relation entre l’accusé et ses enfants.

Visite et échange dans un centre de supervision

En principe, l’interdiction de communiquer avec un parent n’empêche pas l’accusé d’exercer ses droits d’accès vis-à-vis ses enfants. Par mesure de précaution, il est mieux de mettre en place un accord ou d’obtenir une ordonnance imposant un lieu et une méthode d’échange permettant à l’accusé de voir ses enfants sans violer ses conditions de mise en liberté.

À cet effet, il peut être utile de communiquer avec un centre local offrant des services de supervision pour permettre à l’accusé de continuer à exercer ses droits d’accès. Très souvent, ces centres sont aussi des endroits adéquats pour effectuer l’échange des enfants entre parents.

Les meilleurs intérêts de l’enfant

Dans tous les cas, le droit du parent accusé de violence familiale de continuer à voir son enfant est assujetti au principe du meilleur intérêt de l’enfant. Même si l’incident qui a déclenché les poursuites judiciaires au tribunal pénal était de nature mineure, les juges de la cour familial maintiendront le droit d’accès à un enfant uniquement s’il est dans l’intérêt de cet enfant de continuer à voir le parent accusé. Puisqu’il s’agit d’une mesure avec des conséquences plutôt draconiennes, la suspension du droit d’accès est souvent temporaire. En effet, il est possible pour le parent accusé de violence familiale de réintégrer la vie familiale au fur et à mesure, tant que cette réintégration est dans l’intérêt de l’enfant et que le parent réussi à convaincre le tribunal que la vie et la sécurité de l’enfant ne seront pas en danger.

Dans les cas d’une arrestation d’un parent, il est préférable pour chaque conjoint d’obtenir des conseils juridiques afin de déterminer la meilleure solution relativement aux droits de garde, d’accès et de visite et pour assurer la stabilité du foyer familial.

Karen Kernisant est avocate à Aubry Campbell MacLean et pratique dans le domaine du droit de la famille, du droit pénal et du contentieux civil.